Réparer l'injustice cognitive : repenser la science africaine sous le prisme de l'ouverture. AZILAN, I. December, 2022. Publisher: Zenodo
Réparer l'injustice cognitive : repenser la science africaine sous le prisme de l'ouverture [link]Paper  doi  abstract   bibtex   
Si les enjeux mondiaux de l'ouverture de la science trouvent des échos récents (dès les années 1990 jusqu'aux recommandations de l'UNESCO (2021)), Cheik Anta Diop a été cependant été très visionnaire, quand il disait en 1974 à la conférence d'ouverture de la 9e biennale de l'Association Scientifique ouest-africaine : “ La science en Afrique (ndlr) manque (...) d'informations à un moment où, toutes capacités intellectuelles mises à part, la fécondité du chercheur est fonction de ses moyens de documentation”. Et d'ajouter, “ il devient de plus en plus nécessaire que n'importe quel chercheur puisse bénéficier de la masse considérable d'informations stockées dans les ordinateurs des grands centres spécialisés de l'informatique, qu'il lui suffise de composer un numéro pour accéder à toute la documentation disponible sur un sujet, pour disposer de la liste de toutes les équipes qui y travaillent, de manière à éviter les répétitions, les travaux parallèles, les chevauchements de toutes sortes et les gaspillages de temps”. L'état des lieux actuel de la science africaine basé sur les données bibliographiques de Scopus et Web of Science montre un retard alarmant par rapport aux autres continents. La production scientifique de l'Afrique s'estime à 2% de la production mondiale (Cf Web of Science). Dans les faits, la réalité est tout autre. En effet, la production scientifique africaine est difficile à estimer. D'abord parce qu'elle est encore massivement en version papier, ce qui n'est pas comptabilisé par les bases de données précitées. Ensuite, les pays qui produisent dans d'autres langues autre que l'anglais sont marginalisés dans le “système-monde” de la science (Piron, 2018), qui a érigé l'anglais en langue de la science (cf Elsevier). Ce système-monde est centré sur un ensemble d'institutions occidentales qui se définissent comme juges de la science, et qui trient selon leur seuls critères les savoirs qui méritent le sceau de scientificité, et donc qui peuvent être comptabilisés. Enfin, et surtout, parce que le savoir africain est victime d'une injustice cognitive. Florence Piron estime que la recherche scientifique ne peut pas prétendre vouloir ou pouvoir se satisfaire d'une mission interne de faire progresser les connaissances, sans se soucier du monde qui la finance, dans lequel elle existe et qui l'utilise. Mais la recherche africaine, surtout en science sociale, est victime de son africanité, et les questions locales africaines n'intéressent pas le système-monde de la science, orienté par d'autres objectifs quantitatifs. D'où la science africaine a besoin de se réinventer désormais; grâce à son ouverture pour rendre visible son savoir qui ne peut que rester invisible dans les conditions actuelles. Car l'ouverture de la science dans les pays du Nord est source d'aliénation épistémique, dans le sens où les chercheurs africains, face à au coût important de documentation, vont se retourner sur la documentation des pays du Nord devenue libre, pour questionner via ce prisme les questions locales. Des questions d'ordre épistémologiques se posent alors.
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	author = {AZILAN, Innocent},
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